Le grand coffre à jouets du new age, un petit coup de gueule en passant
La « spiritualité new age » est décidément un truc formidable. Chaque mois j’entends parler de nouveaux machins qui n’ont pas nécessairement de relation les uns avec les autres. Le new age est décidément un grand fourre-tout, bien pire que le coffre à jouets d’un enfant gâté.
Passons sur la récupération populaire de la physique quantique par des gens qui n’y comprennent cure et n’ont probablement jamais lu un ouvrage scientifique sur le sujet, passons sur la récupération honteuse des spiritualités amérindiennes, hindoues, tibétaines et orientales en générale, celles concernant le druidisme, l’animisme, le chamanisme et les autres paganismes anciens, passons encore sur les récupérations de cultes des saints, des anges et des archanges du catholicisme, et venons-en à mes dernières trouvailles.
On avait entendu parler de la noosphère, élément ajouté à l’hypothèse Gaïa, au départ tout à fait sérieuse et scientifique dont il était question dans le précédent article. Il y a les annales akashiques, il y a l’Eden, passons… A peu près 100% des éléments appartenant à des systèmes religieux existants ont été incorporés dans l’immense bazar de la pseudo-spiritualité new age, qui pille à qui mieux-mieux les systèmes spirituels, sans se soucier de cohérence. C’est que chacun apporte « sa pierre à l’édifice », dans ce qui s’avère être une véritable auberge espagnole de la foi.
Que les gens croient ne me dérangent pas. Que cette foi ne soit qu’une fuite des problèmes fondamentaux de l’existence vers un grand délire de l’imaginaire, c’est autre chose.
Nous savions que nous avons tous un « guide ». Maintenant, j’apprends que nous en avons en fait plusieurs, et que l’un (ou plusieurs ?) d’entre eux est en fait un « veilleur noir ». Je m’épargne la recherche du lien où j’ai découvert ça, ce n’était ni drôle ni intéressant. En gros, le veilleur noir est un guide aussi, mais il est moins sympa. Pas lumineux. Noir, quoi. Le veilleur noir est une sorte de sith de la spiritualité, il représente le côté obscur de la force. Grâce à lui, si jamais vous étiez entrainé sur le mauvais chemin de la connaissance, vous pourriez vivre des trucs pas très cools, mais plutôt méchants. Bref. La spiritualité new age ne vaut pas mieux que les monothéismes, en terme de manichéisme. Même la guidance spirituelle se réduit à ces considérations : bien / pas bien. Navrant.
La réincarnation, ai-je besoin d’en parler ? La réincarnation, l’un des plus gros gadgets de la spiritualité new age. Le truc qui permet d’avoir une réponse à tout. Si quelque chose vous échappe dans votre existence, une souffrance qui vous dépasse, qu’à cela ne tienne. Ne cherchez surtout pas un sens, ou une manière d’intégrer cette souffrance dans votre expérience afin de la dépasser et de vous métamorphoser réellement. Dites plutôt qu’on passe son temps à sauter d’une existence à une autre sans jamais rien retenir de la précédente à part une mystérieuse « influence karmique » qui semble dénuée de tout fondement factuel, mais qui, pourtant, pourra être mise en lumière par une infinité d’interprétations fantasques et souvent sans grand intérêt autre que de rassurer. Si l’on a perdu des proches, la croyance dans la réincarnation rassurera. Si l’on répète sans arrêt les mêmes erreurs dans cette vie, inutile d’apprendre à ne plus les faire. Mieux vaut considérer que, de toute façon, « c’est le karma », et que c’est super comme ça. Ne tirez aucune leçon, le karma se charge de tout : il prend vos responsabilités à votre place, assume vos souffrances à votre place. Voilà une façon pratique de divertir les vrais problèmes, sans jamais avoir à les traiter, preuve que le new age fonctionne décidément comme un emplâtre sur les problèmes de notre temps. Qu’importe si vous passez à côté de vous-même, du moment que vous êtes performant et intégré, ceci au prix d’une « spiritualité » qui occulte les choses plus profondes et plus essentielles.
Suis-je en colère contre le new age, avec tout ce que je peux écrire pour le critiquer sur ce blog ? Non, ça ne servirait à rien. Le new age est une création humaine, ni plus ni moins qu’un outil de gestion de la souffrance humaine. S’il doit en être ainsi, soit. Mais alors qu’on me permette au moins d’en critiquer les travers, qui entravent le véritable développement de l’intégrité de la plupart de mes contemporains. Et c’est justement ce que je me permets. Ça n’engage que moi.
Disons qu’avec tout ce que je découvre au fil du temps, j’ai l’impression de voir se déployer devant mes yeux le parfait inventaire de la boite à outil de gestion de la misère. Une boite à outil qui plante des clous et rafistole des planches cassées, change des lattes moulues et permet d’y repasser un coup de vernis, mais une boite à outil qui ne crée rien, qui ne fait que récupérer, recycler, réagencer des religions abêtissantes en un truc tout aussi abêtissant. Le new age est apparu en même temps que la télévision et que la société de consommation. Ce n’est sans doute pas un hasard.
Un dernier truc pour la route, les familles d’âmes.
Nous ferions tous partie d’une famille d’âmes, que nous retrouverions d’incarnations en incarnations, pour ne rien apprendre ensemble, pour subir en groupe notre karma contre lequel nous ne pouvons rien. Les familles d’âmes entrent dans la case de la caisse à jouets qui concerne justement la réincarnation.
Peut-être que c’est vrai. Peut-être que c’est faux. C’est invérifiable et invérifié, ça ne sert qu’à fournir des « explications » à certains problèmes de l’existence, à leur donner un sens qui, par conséquent, n’a plus besoin d’être réfléchi et mis en question. La conscience est soulagée, tranquillisée, disponible pour une page de pubs.
La religion avait bien préparé le terrain pour la télé et les autres mass-médias, le new age est venu achever le travail de débilisation des masses.
Je rencontre constamment des gens intelligents, capables de réflexion, de logique, qui font entrer ces systèmes dans leur système à eux, en ne songeant même pas à les mettre en question. C’est pour moi la définition de l’attitude superstitieuse. Une attitude qui trouve ses racines dans le cerveau profond, mais que le reste de nos capacités cognitives est pourtant capable de remettre en question. Il suffit de vouloir le faire.
Mais apparemment, le new age, la nouvelle religion du temps auquel je me suis incarné, répond en premier lieu à une seule problématique de fond : l’angoisse existentielle de l’homme face à la vie. Tout est sacrifié sur cet autel, à commencer par la vérité, l’authenticité. Cette religion superficielle annihile des esprits, détruit des personnes à travers les logiques grégaires et sectaires.
Je ne suis pas en colère contre le new age, non. Je suis désespéré par cette éternelle guerre contre l’intelligence.
Je ne dis pas que j’en suis un dépositaire. Si je l’étais, sans doute que je n’écrirais même plus sur ce sujet, et c’est sans doute ce que je finirai par faire. Je ne détiens pas la vérité, juste une façon de voir les choses que j’expose sur ce blog, et que j’estime suffisamment légitime pour être exprimée. Mon époque m’exaspère, et le new age n’en est pas une cause, mais un symptôme que j’expose à la vue de mes quelques lecteurs. Il en est une émanation logique, et il est étonnant de voir tous ces gens qui parlent de trucs comme « l’ère du Verseau » ne pas voir en quoi ils sont les sujets d’un temps qui produit des croyances, tandis que les croyances produisent essentiellement de l’illusion et de la soumission, et non pas un changement tant espéré. Car le changement est produit par l’action juste, et non par l’espoir abruti et inerte engendré par une machine à créer des gadgets pseudo-spirituels qui ne servent justement qu’à l’inertie.
Il n’y a pas et n’y aura pas d’ère du Verseau, tant que les gens croiront bêtement à son avènement.
Il y aura en revanche une prise de conscience générale, lorsque les masses auront vaincu leur opium. Le new age est l’un de ces opiums. Il est une création de l’homme d’une époque qui n’a pas encore appris à se libérer de la peur, et qui croit que cette peur sera vaincue par un temps meilleur. L’avènement de ce temps meilleur dépend des actions que cet homme mènera ou ne mènera pas pour que se mettent en place les conditions de sa survenue. Pas autrement. Remettre dans le destin ou dans l’immanent cet évènement, c’est comme faire un pari sur l’avenir avec une paire de dés ou une roulette. Ce n’est ni responsable, ni intelligent. C’est béat, passif, inerte.
Mais assez sur ce coup de gueule du jour. Je finirai juste sur une injonction : réveillez-vous ! Arrêtez enfin, après tous ces millénaires, de vous en remettre à des croyances qui ne sont que des berceuses pour grands enfants effarouchés ! Grandissez ! J’entends souvent dire que l’homme est encore « adolescent », or je crois, justement, que la pseudo-spiritualité new age est ce petit truc rassurant auquel l’enfant en transition vers l’âge adulte s’accroche encore. Un « teuteu », une « tétine », une peluche pour une créature qui refuse encore d’affronter ses responsabilités et la grandeur de son existence, l’intensité de sa conscience qui le torture.
Un jour peut-être, l’homme se réveillera. Espérons, avant que cela ne soit trop tard. Avant que l’homme ne se crashe dans un ravin après une soirée en « boite » trop bien arrosée comme un adolescent qui se croyait capable de tout, y compris de « créer sa réalité par la pensée », comme je l’ai souvent entendu de la part de gens de ce milieu. Un sentiment de surpuissance qui trahit cruellement sa puérilité.
Oui, je suis dur dans mes paroles, et dans mes idées. Des fois, moi aussi, je me dis que la tendresse sauvera le monde. Que l’amour, les douces paroles, la constante indulgence seraient de mise, mais je ne sais pas… Je ne m’en sens pas capable. Je suis humain, comme tous, et je me désespère, en même temps que je sens profondément en moi l’inutilité de cette attitude. Il est tout aussi inutile d’être désespéré, en colère que d’être indulgent ou même indifférent, dans la mesure où ce que je ressens, et ce que j’écris dans ce blog, ne changent rien… Je n’en suis pas encore au stade où je peux affronter la dérision de la vie humaine, et la bêtise des comportements humains sans frémir. Ma propre bêtise m’effraye aussi, bien sûr, mais au moins ai-je le sentiment de lutter contre, même si c’est peut-être inutile, et tout aussi dérisoire.
Je ne peux m’identifier ni à la béatitude imbécile de mon époque, ni à l’espoir d’une spiritualité profonde et salvatrice qui n’est pas encore à ma portée. Je suppose que cela fait un bon dernier mot pour ce post.
Salut à vous, humains de toutes sortes qui comme moi faillissez à trouver la bonne façon d’être. Essayons-donc ensemble, si c’est possible…
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