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L'Oeil du Selen
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19 octobre 2017

Brève de manif, ou la démocratie à la rue

Ce matin j'étais en ville pour divers trucs et je croise à Saint-Étienne la manif de « Ceux qui foutent le bordel ». Comme je me sens solidaire de ces gens, je m'arrête un instant pour regarder et écouter. Rapidement je trouve de quoi m'émerveiller de leur créativité en matière de slogans.

 

« Macron t'es foutu, les fainéants sont dans la rue ! »

 

Ou encore des trucs comme (je n'ai pas réussi à bien entendre, puis ça ma lassé et je suis parti) :

 

« gnagnagnagna on a gagné ! »

 

Participer à des manifs semble de plus en plus être un rituel d'apaisement du veau qu'est le français (comme disait De Gaulle). Je serais Macron, j'aurais un sourire en coin à entendre ces professions de foi et ces chants qui n'ont rien à envier aux chansons de supporter les plus banales, et je continuerais « d'assumer ma politique de winner », en pensant que ces gens feraient mieux de... bah de passer à autre chose, tout simplement.

 

Maintenant dans les manifs, mais aussi le reste du temps, à Saint-Étienne comme à Lyon, on croise des escouades entières de policiers et de soldats en armes. Il y en avait pas moins de huit ensemble à la gare de Perrache il y a quelques semaines. C'est le seul changement que j'ai constaté dans les rues qui ne font en effet pas la démocratie, depuis quelques temps. Ça et le surcroît de gens qui font la manche ou « ont des problèmes avec la langue », pour parler comme un bon progressiste sociétal du 21e siècle.

 

Là où les politiciens autant que les syndicalistes n'ont pas changé leurs méthodes pourtant lourdement éprouvées dans le creuset de l'échec, le monde occidental a commencé à changer en pire, sans pour autant qu'une manif ne soit autre chose qu'un entraînement à supporter le chant d'un meneur qui manie les mêmes rimes et les mêmes slogans depuis 30 ou 40 ans, sans pour autant avoir ni une quelconque maîtrise du chant (mes pauvres oreilles...) ni une quelconque prise de conscience que ce genre de messe n'a strictement aucun impact sur les glissements de terrain qui caractérisent la société occidentale depuis maintenant plusieurs décennies. J'ai moi-même participé aux manifs étudiantes de la fin des années 80, début des années 90 (je crois que c'était Jospin le ministre de l'éducation à l'époque), puis je n'ai plus jamais remis les pieds dans une manif, ayant vite compris l'entourloupe, là aussi. Mais il faut le dire : ces manifs étaient plutôt un moment festif pour les lycéens que nous étions, et aussi sans doute un rite de passage et d'apprentissage : on le fait pour savoir ce qu'on fera, plus tard, quand on sera salarié, ouvrier, bref un serf du système social occidental. On sait déjà, plus ou moins confusément, que cette partie de notre destin est à peu de choses près tracée et en tout cas que c'est ainsi que fonctionne le monde dans lequel on vit. Il faut donc bien commencer un jour... quant à continuer toute sa vie sans jamais apprendre plus loin...

 

A l'heure qu'il est j'ai seulement pu dénicher un article sur les manifs :

 

http://www.lepopulaire.fr/limoges/social/politique/2017/10/19/les-pancartes-et-slogans-de-la-rentree-sociale-a-limoges_12585830.html

 

Bon alors voilà, c'est un concours de bons mots et de références comme notre société ne sait plus qu'en foutre, sorte de mouvement social à la Tarantino où le serpent se mord tellement la queue qu'il ne se sent plus pisser.

 

On me dira que je ne propose rien. Oui je sais. Mais en la matière, la rue propose, et Macron dispose. C'est du pareil au même. J'en appelle à la rue, aux syndicats, aux manifestants, aux citoyens, pour créer un mouvement enfin constructif, enfin utile, enfin contraignant pour le gouvernement, enfin « efficace ». Plutôt que les nuits à dormir debout et les matinées à marcher en zombies récitant des slogans usés jusqu'à la moelle de la corde, et tout ça pour, comme avec les urnes, se donner l'illusion de « faire quelque chose ».

 

En vérité je vous le dis, on manifeste parce que c'est notre manière de démontrer notre impuissance. C'est sans doute ça, « veauter avec ses pieds » : être aussi inefficace qu'avec le suffrage. Une autre façon d'être un troupeau de suiveurs et de soumis, qui bêlent un peu plus fort qu'à l'habitude, un peu plus fort que le bétail après l'abattoir. Il arrive qu'un veau s'échappe une fois de temps en temps. Mais c'est tout. Manque plus qu'à les pucer.

 

 

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